La parole. Qui donne au temps sa mesure.
Avant la danse et le riz. Après la danse et le riz.
La parole plus grande de mystère que les transes,
plus féconde que le germe sous la voûte des pluies.
Qui est l’aube de l’instant proféré par l’esprit.
Et fait la terre moins dure.
Et la peine moins dense.
La parole, Jolo, dans la rivière de leurs bouches !
Sur le seuil des lèvres l’ivoire des noms sacrés.
Et la langue qui sculpte, agile, le corps des mots.
La parole, Jolo, dans le lit de sable du cœur,
un souffle du désert puis la chute des eaux,
le sillage si clair d’une lente pirogue.
Enfance de ta parole fraîche comme un envol de pigeons verts
et fébrile comme une fuite de perdrix.
Sa source, l’âme fière des ancêtres dans le miroir des songes.
Sa source qui est un autre, un danseur de lune vierge,
un chasseur lancé sur les pistes de ta mémoire,
sur les vieilles traces de ton enfance : une petite antilope
dans l’herbe du matin.