Nous pouvons croire ou pas qu’ayant été chassés avons erré durant des millénaires et que ce fut un jour seulement, le cerne unique des âges resserrés, l’oubli ligneux du cœur ancien, car les sols acides ne laissent rien, traces ou vestiges tout s’efface et tout n’est qu’un reflet sur l’œil de la nuit, nous pourrions croire aussi qu’il y eut des villes avant, peut-être qu’il y eut des villes, habitées par qui, peut-être qu’il n’y eut rien, pas même de musique mais seulement la pluie et des grenouilles heureuses. Il arrive qu’un soir je me dise comment, étant au milieu d’elle, de ses grands arbres, enclos malgré la plaie, la seule issue pour la raison soit qu’on vienne d’en-haut, que l’on tombe en tout cas, qu’il y ait chute au commencement et que si nous parlons encore c’est grâce à cet inventement, on se sent posé là – est-ce par une main, une répercussion glaciaire – assis en soi et compris d’elle, assis en elle par devant sur son pagne odoré par des fourmis humides. Sans doute qu’afin de survivre il fallut se donner une histoire d’avant le temps, se dire que nous ne fûmes pas pour rien jetés dans les ténèbres, engouffrés dans l’oubli, que c’était nécessaire qu’elle nous avale ainsi, qu’il n’y eut qu’un seul jour et une même nuit, une sylvestre durée de nous.
A l’heure de la séparation, du bris des choses en deux, j’enfante la case autour de moi, je m’en obombre comme on s’oint d’huile après l’eau fraîche, c’est qu’il nous faut un nid contre le froid, le grand froid de décembre et celui de soi-même, un tissage de souï-manga, quelque chose d’accroché ou de là sur la terre, une mongùlù qu’on ne voit pas.
voix : Valérie Capdepont
musique : Olivier Bobinnec
musique : Olivier Bobinnec
en vous lisant je me sens emprise, d'une grande très grande forêt…
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Et l'on se retrouve, hommes petits, pygmées perdus dans cette forêt première, forêt merveilleuse. Effrayante et maternelle à la fois. Quel voyage.
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