Vues depuis la tranchée – Marie-Pier Daveluy

Créneaux n’est pas un blog à lire dans sa chaise berçante après avoir laissé ses claques à l’entrée. L’écriture est de crise, d’amour, de guerre, une flèche tirée d’en haut ou du sillon creusé dans la chair. Depuis la tranchée, la vision s’ente et trace au couteau, hors des apprêts du littéraire, aux limites du moi et du vivre l’autre en soi sur la faille du monde.
Bribes et poème

Je suis issue des tranchées d’une guerre à la mémoire handicapée de naissance. Et le plus aberrant dans cette histoire de postures et d’impostures, c’est qu’il m’arrive de me prendre pour la tranchée elle-même. Car si je perds parfois le cap, je m’entête à garder les deux pieds dans la brèche, journée de merde ou pas. C’est à partir de ce point de vue panoramique sur nos ravages quotidiens depuis lequel je vous parle, et à partir duquel, très souvent, je vous écris.

J’écris dans l’empressement de saisir le regard évanescent qui se cache sous la lentille.

J’écris pour voir, pour tendre l’oreille, pour vérifier si La Tranchée souffle encore. Simplement pour dire « Non », encore une fois, malgré le peu de parois que je trouve à présent pour en faire résonner la voix. À en faire muer le souffle en son vibrant.

J’écris « vous », car je ne peux me figurer écrire sans le reflet d’une certaine conscience sociale ou personnelle, même fictive. À propos de Créneaux – raison et paradoxe

—————–IV – Au crescendo du temps
    j’ai mué mon âme en réquisitoire/pour ton envol \
       que s’assèchent enfin les cordes / qui te lient à la surface / des choses /
       de cette suie d’encre stagnante entre tes mains / qui ne pleuvent plus qu’à travers mon corps
  – en reste              
                         / frissonnant dans le tournoiement des feuilles \
                                       les herbes folles
                                           
    pour assouvir ton désir de dire
                                            le vent
                        emporte murs comme fenêtres de la mémoire du vivre
    j’ai soudé l’ombre de tes doigts / à mon ongle, mon coeur d’ivoire
       laissé mon âme au dépositoire
                                        / (un temps) \
    et t’ai légué mon antre, sauvage, à la lisière du moi

                            pour te sentir souvenir encore une fois




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dissémination l’écriture aux limites webassociation des auteurs

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