Ne surtout pas l’aimer dès ton arrivée le matin ; attendre une parole en retour, un poème sur le poème, quelque chose de doux, pas cette terre brûlée qu’on abandonne en attendant les semailles.
Regarde, le velu est immonde et trop similaire à ta propre peau. La différence est lisse, aigrie et te refuse. Il y a aussi cette barbe à l’horizon, ce sévère qui naît en préjugé et fera demain la vie conjugale.
Dans un passé lointain, elle s’habillait en villageoise, seins à l’air, et ne se tressait que deux fois l’an.
Elle est ce qu’elle rejette, ce vers quoi elle coure, cette bouteille à remplir, cette veste, cette robe, cet assainissement de soi imposé de l’extérieur.
La ville trouve son sens dans son système d’égouts.
VI
Mon environnement naturel, c’est le solitarium ; j’y suis heureux, mais malheureux partout ailleurs, même si le sourire et la gaieté subsistent comme autant de masques protecteurs.
VII
Parfois ressasser le passé pour saisir la moelle, cette parcelle de vie enfouie par toutes les vibrations des jours. Tout se dépose. La surface voulue lisse, rugueuse, ce qu’on dit sans y penser, ce qu’on fait les yeux fermés, l’odeur de la vie qui échappe à notre odorat anesthésié. L’air devient le précieux souterrain.
Sonder les paysages et les non-lieux, se faire une image de ce qui peuple le fond de la mer et les entrailles de la terre. Relire les mots qui se sont trop vite attachés les uns aux autres, se trouver une vitesse et courir vers le simple-profond. Identifier les points lumineux, les parcourir comme la promesse d’un partage plus sain entre les hommes.
Places vides du cœur où tu te retrouves.
VIII
Ce que l’on dit de toi lorsque tu n’es plus là, c’est pour remplir le vide.
Dix mètres sous terre, c’est un nouvel écosystème. Enterré, mais pourtant si haut dans le ciel.
La seule façon raisonnable de rejoindre mars, c’est de s’enterrer vivant jusqu’au centre de la terre.
La mort d’une anomalie rétablie un peu la paix dans le monde. Il y a ceux qui diront que les silhouettes ne représentent que le faux enraciné dans le cœur du poète.
Que fait le poète à part se plaindre à longueur de journée ?
Tu as atteint l’ouverture d’esprit nécessaire pour te contredire à haute voix, mentir et dire la vérité comme les deux facettes d’une même réalité difforme, déformable.
J’ai cru comprendre que, poète, je finirais seul, fou et pauvre.
Toujours faire fermenter cette haine des corps de métier, tous ces diplômes, toutes ces années qu’on a laissé atteindre le degré de putréfaction absolu.
© Franck Stéphane Ndzomga, 2016
blog de Ndzomga : Camisole et mots
illustration : Kmo
Des résidences d’écriture numérique, webassociation des auteurs